13 décembre 1553 : naissance d’Henri IV

Le Vert Galant s’esclaffait : « Paris vaut bien une messe ! » disait-il devant les Français ahuris. Par ces paroles provocantes, Henri de Navarre, le dirigeant des armées protestantes, acceptait de se convertir au catholicisme, mettant alors la main sur le royaume de France.

Roi légitime ? Oui. Non seulement grâce au droit de conquête mais aussi parce que désigné comme héritier par la loi salique et son cousin, le dernier roi Valois, Henri III.

Roi accepté ? Non. Impopulaire et détesté par les catholiques, Henri de Navarre avait dû opérer une lente et patiente reconquête du royaume, déjouant à la fois les stratégies de la puissante ligue catholique. Le futur Henri IV était avant tout un roi guerrier, pragmatique et manipulateur, bien loin du mythe du bon Henri.

Guerrier d’abord ; Henri IV avait contre lui la France et l’Europe catholiques. Il se ruait dans les batailles en première ligne, ralliant auprès de ses couleurs des soldats à qui il promettait des pillages, et du butin. Si ses victoires étaient suivies de massacres, Henri haussait bien volontiers les épaules ; si les hommes se montraient si violents, c’était parce que l’époque était d’une extraordinaire violence. Henri, comme tant d’autres, raisonnait ainsi. Dieu allait l’absoudre, de toute manière. Après avoir été couronné le 27 février 1594 à la cathédrale de Chartres, il s’employa à une vaste opération de popularité, pour reconquérir le cœur des Parisiens qu’il avait affamé lui-même.

Pragmatique ; Henri IV avait peut-être lu Machiavel. Dans sa tête, l’intérêt de l’État primait sur tous les autres. S’il fallait abjurer sa religion et se convertir pour gouverner, soit ; ce fut dans ce calcul qu’Henri se convertit au catholicisme. Les alliés protestants du roi s’estimèrent dupés et s’insurgèrent ; le roi, après avoir fait la guerre aux catholiques, dut faire la guerre aux protestants.  

Manipulateur ; Henri IV l’était assurément. Il cachait ses talents d’intriguant derrière un sourire chaleureux, un regard séduisant et des manières paternelles. C’était un moyen de faire oublier ô combien ses partisans les plus fidèles ont été si mal récompensés. Le Poitou, le Saintonge, le Limousin et le Périgord, qui avaient en commun d’avoir été les provinces les plus loyales à Henri l’ont chèrement payé ; après les conflits, elles avaient été accablées et écrasées par une fiscalité qui les poussèrent à la révolte. Révolte matée dans le sang.

Quel paradoxe avec le mythe posthume du bon Henri ! Derrière ses expressions bienveillantes, le roi Henri IV était un roi absolu ; il avait compris les maux qui avaient amené aux guerres de religion. Ils se résumaient à trois choses : le grand pouvoir des chefs militaires, auparavant monopolisé par les Guise et les Coligny ; les défiances des États généraux ; les désobéissances des parlements. Henri IV réduisit alors le pouvoir militaire, refusa de convoquer les États généraux et contraignit les parlements à l’obéissance. L’autorité royale émergeait à nouveau, renforcée et jalousement conservée. Derrière le sourire bonhomme d’Henri IV perçaient déjà la moue ennuyée de Louis XIII et la morgue hautaine de Louis XIV.

Les quarante années de guerre civile se conclurent par l’assassinat du roi, le 14 mai 1610, des mains d’un fanatique, Ravaillac. Les tensions religieuses ne conduisirent pas une nouvelle fois à une guerre sanglante qui aurait pu survenir après la disparition brutale du Vert Galant. C’était la preuve que le roi Henri IV était parvenu à ses fins. Son édit de Nantes en 1598 avait fini par inscrire une réconciliation, certes amère, certes forcée mais permettant la paix. Le premier roi des Bourbons avait arrêté un temps de troubles. À ses successeurs d’annoncer le temps de la grandeur.  

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